Fonds friches : recycler et transformer le foncier artificialisé en opportunités de développement urbain

Imaginez un terrain autrefois grouillant d'activité industrielle, maintenant silencieux et abandonné, ou une parcelle de terre agricole laissée en jachère pendant des années. Ces terrains, connus sous le nom de friches, ne sont pas seulement des témoins de la transformation de nos paysages urbains et ruraux. Ils constituent une opportunité pour un développement durable et respectueux de l'environnement.

En France, ce potentiel a récemment été reconnu et mis en valeur grâce à une initiative gouvernementale : le fonds friches. On parle dans cet article des appels à projets qui ont successivement été menés ces dernières années et des projets qui ont vu ou qui vont prochainement voir le jour grâce à ce dispositif. Après tout, la seconde main n’est pas réservée qu’au prêt-à-porter, les friches ont aussi droit à une nouvelle jeunesse.

Friches : qu’est-ce que c’est ?

Par définition, une friche est un terrain autrefois utilisé pour une ou plusieurs affectations, qui est aujourd’hui à l’abandon.

Pour le gouvernement qui a lancé un vaste plan national de recyclage des friches, celles-ci sont soit des terrains nus, déjà artificialisés et inexploités, soit des zones d’habitat, d’activité ou mixte qui se caractérisent par un manque d’occupation et/ou un besoin de requalification des usages.

Polluées ou non, ces friches peuvent être commerciales, urbaines, ferroviaires, routières, industrielles, aéroportuaires, militaires ou minières. Ce foncier déjà existant et artificialisé permet de ne pas consommer davantage d’espaces naturels, forestiers et agricoles.

Le recyclage des friches contribue également à l’objectif de “zéro artificialisation nette” du gouvernement, selon la loi Climat et Résilience.

Comment financer le recyclage des friches ?

Le processus de transformation des friches en terrains utilisables est un défi qui nécessite une planification et une mise en œuvre rigoureuse. Plus important encore, il nécessite un financement adéquat. Alors, quels sont les mécanismes de financement disponibles pour soutenir le recyclage des friches ?

L'un des exemples les plus notables est le fonds friches, une initiative France Relance qui fournit des subventions pour financer divers aspects du recyclage des friches, tels que les études de faisabilité, l'achat de terres, ainsi que les travaux de démolition, de dépollution et d'aménagement.

Le fonds friches permet de réaliser avec de nombreux moyens déployés, des opérations de recyclage et de renouvellement de terres déjà artificialisées. Les projets retenus dans le cadre d’appels à projets sont orchestrés par les préfets de région pour les aménagements urbains et par l’Ademe pour la reconversion des friches industrielles et minières polluées.

L’enveloppe budgétaire initiale allouée aux projets de recyclage des friches était de 300 millions d’€. Face à l’engouement et aux multiples demandes des territoires en matière de reconversion du foncier inexploité, la quasi-entièreté du budget a été engagé dès le premier appel à projets. Le gouvernement a alors fait une rallonge de 350 millions d’€ afin de financer d’autres projets.

Fonds friches : une opération du gouvernement pour réutiliser le foncier

Le fonds friches est une initiative gouvernementale qui fournit des subventions plus ou moins importantes pour aider les territoires métropolitains d’outre-mer à financer le recyclage des friches. Ce programme a connu pour l’heure trois éditions, chacune augmentant le financement et élargissant l'impact du programme.

1ère édition du fonds friches : 290 millions d’€ de subventions

Lancée en 2020, la première édition du fonds friches subventionne 544 projets pour un budget total de 290 millions d’€. Le dispositif profite à l’ensemble du territoire métropolitain mais également en outre-mer, étant donné que tous les départements disposent à minima d’un site lauréat du fonds friches.

Deux appels à projets ont été lancés dans le cadre de ce fonds : l'un, d'un montant de 259 millions d'€, sous l'égide des préfets de région pour les friches urbaines, et l'autre, doté de 30 millions d'€, supervisé par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (ADEME) pour les friches industrielles et minières.

Les projets lauréats témoignent de l'ampleur et de la diversité des initiatives prises. Dans le cadre du fonds "recyclage foncier" piloté par les préfets de région, 441 dossiers ont été sélectionnés. Ces projets permettront de traiter près de 1 200 hectares de friches, conduisant à la création de plus de 3 millions de m² de logements - dont près d'un tiers de logements sociaux - et de plus de 1,3 million de m² de surfaces économiques (bureaux, commerces, industries, etc.). Un quart de ces projets sont associés aux initiatives "Petites villes de demain" ou "Action cœur de ville", reflétant leur engagement en faveur d'une haute qualité environnementale.

L'appel à projets de l’Ademe, quant à lui, financera 111 projets, dont 8 sélectionnés par les préfets de région. Ces projets comprendront 36 travaux de dépollution intense et de reconversion d'anciennes friches industrielles ou minières de type ICPE (installations classées pour la protection de l'environnement), couvrant au total 165 hectares de friches. On prévoit qu'ils conduiront à la construction de près de 300 000 m² de logements et plus de 400 000 m² de surfaces économiques. De plus, 75 projets seront financés pour la réalisation d'études.

2ème édition du fonds friches : 280 millions d’€ supplémentaires

La deuxième édition du fonds friches, en 2021, a abouti à une fructueuse sélection de 503 projets lauréats supplémentaires parmi 1130 candidatures reçues. Grâce à plus de 280 millions d'€ de subventions allouées, ces projets permettront la réhabilitation de plus de 1100 hectares de friches.

L'impact de ces projets est considérable : ils sont prévus pour générer plus de 1 800 000 m² de logements, l'équivalent d'environ 25 000 logements, dont 40 % seront dédiés à l'habitat social. En outre, ces projets contribueront à la création de plus de 1 800 000 m² de surfaces économiques, incluant des bureaux, des commerces et de l’industrie. Les initiatives soutenues sont variées et comprennent entre autres l'émergence de logements sociaux, de tiers-lieux et l'accueil d'entreprises.

Début 2022, 21 nouveaux lauréats ont été annoncés dans le cadre des projets financés par l'Ademe. Ces projets, qui bénéficient d'un soutien financier de 18 millions d'€, devraient permettre la création de plus de 85 000 m² de logements, dont plus d'e 1/3 de logements sociaux, et environ 250 000 m² de surfaces économiques et industrielles.

3ème édition du fonds friches : 100 millions d’€ d’aides

La troisième et dernière édition en date du fonds friches a été inaugurée en 2022. Cette initiative conjointe de l'Ademe, chargée des friches industrielles et minières polluées, et des préfets de région, responsables des autres friches (commerciales, urbaines, etc..), a encore une fois suscité un vif intérêt.

Au total, plus de 1 200 candidatures ont été reçues pour cette édition, sollicitant 431 millions d'€ d'aides. Suite à un examen attentif, les préfets de région et l'Ademe ont retenu 264 lauréats, incluant 4 dossiers communs, pour une allocation de 121 millions d'€ de subventions. Ces fonds proviennent du redéploiement des crédits des précédentes éditions.

Les lauréats sélectionnés s'engagent à réhabiliter près de 675 hectares de friches. Leurs projets devraient créer environ 1 million de m² de nouveaux logements - dont près de la moitié seront des logements sociaux - 179 000 m² d'infrastructures publiques et 750 000 m² de surfaces économiques. Parmi ces surfaces économiques, près de 200 000 m² seront dédiés à des activités industrielles.

Ces résultats témoignent de l'ambition des projets soutenus par le fonds friches pour contribuer à la transformation durable de nos villes.

Quelques projets de recyclage de friches sur l’hexagone

Dans toute la France, des projets ambitieux de recyclage de friches transforment les paysages urbains et redonnent vie à des espaces abandonnés. Ces initiatives englobent non seulement des réhabilitations environnementales, mais aussi des créations de logements, de locaux professionnels et d'espaces publics. Voici quelques exemples notables de ces projets innovants et inspirants.

Les Halles de la Cartoucherie à Toulouse

Situées à Toulouse, les Halles de la Cartoucherie sont le théâtre d'un projet ambitieux de réhabilitation et de revalorisation. Les travaux prévoient notamment la transformation de la grande halle en un grand tiers-lieu avec salle de spectacle de 800 places, espace de coworking de 170 postes de travail, foodhall de 27 stands des cuisines du monde et équipements sportifs indoor avec murs d’escalade et terrains de squash.

Ce vaste projet architectural s'inscrit dans le prolongement de la revitalisation de l’écoquartier de la Cartoucherie. Il se construit dans une démarche de développement durable dans son aménagement, avec notamment la construction de programmes immobiliers neufs bas carbone, conformes à la RE2020 et éligibles au nouveau dispositif Pinel+.

La tour Bretagne à Nantes

À Nantes, près du centre-ville, un autre projet de recyclage de friche urbaine est en cours. Depuis la découverte de traces de poussières d’amiante en 2017, la tour Bretagne, élément incontournable du patrimoine nantais est une coquille vide. Début 2023, le promoteur Giboire, propriétaire majoritaire de cet édifice de 144 mètres de hauteur a annoncé vouloir lui donner une seconde vie.

Après d’importants travaux budgétisés à 120 millions d’€, la tour Bretagne 2.0 devrait accueillir à l’horizon 2028 un hôtel, des commerces ainsi que des logements. 4 cabinets d’architectes sont encore en compétition, le nom de celui qui réalisera cette opération massive sera dévoilé au mois de septembre 2023. L’une des seules consignes données est de faire de cette haute tour un espace ouvert et accessible à tous.

Le quartier Brazza à Bordeaux

Brazza à Bordeaux est l’exemple même du recyclage d’une friche industrielle à l’échelle de tout un quartier. Situé sur la rive droite de la Garonne, face à la cité du vin et des bassins à flot, le quartier Brazza s’inscrit dans le projet de zéro artificialisation nette des sols grâce à la dépollution, à la renaturation et au réaménagement complet du site. À l’horizon 2030, le quartier doit accueillir 9 000 habitants.

L’habitat est l’un des principaux piliers du projet d’aménagement du quartier Brazza. Bordeaux étant une ville où l’immobilier est tendu, de l’offre supplémentaire est la bienvenue. Au total, près de 5000 logements individuels et collectifs doivent être construits. Des logements de différentes formes : immeubles sur pilotis, échoppes bordelaises, bâtiments de la coulée verte “Brazzaligne” et des habitations de plain-pied en front de Garonne.

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